Le corps astral de l'indienne
Acte II d'un conte érotique de l'adolescence.


l'indienne

"Au sommet de la montagne"
"Est suspendu un nuage"
"Et mon coeur mon coeur"
"Est suspendu à lui."


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D'après mes calculs, je devrais être au repère numéro 9. Je remercie le ciel de n'avoir pas été repéré. Je franchis un petit monticule de terre, vraisemblablement sculpté par la main de l'homme. Un regard circulaire sur le site, me montre la présence d'ombres inquiétantes: des formes grossières qui s'alignent au niveau de mes yeux comme des gnomes prêts au combat, d'autres ombres déchiquetées en forme d'épouvantails disséminées ici et là; l'envol hystérique de mystérieux oiseaux me glace d'effroi.

épouvantail indien
Je cherche le repère avec anxiété: déchiffrer le message et quitter au plus vite cet endroit sinistre. Là, tout près, à bout de bras, une pierre fichée en terre légèrement penchée sur le côté gauche, derrière laquelle doit se trouver la boite de métal dans laquelle se trouve le message; c'est ainsi qu'il est écrit sur le message du repère numéro 8. Le contenant n'est pas là. Est-ce la bonne pierre, ai-je bien réalisé le trajet décrit? Je m'interroge et m'inquiète, je regarde les autres pierres aux pétroglyphes mystérieux, alignées là tout près, d'une façon désordonnée, et qui s'inclinent dans toutes les directions; je me prépare à les visiter l'une après l'autre. Puis j'aperçois dans un repli sombre du sol, le contenant de métal; j'en extirpe, non pas le message, mais un assemblage hétéroclite de petits ossements, des plumes d'aigles, des morceaux d'écorces de bouleau subcordata aux calligraphies étranges tracées avec du sang, tout cela relié grossièrement à des lanières en peaux de caribou. J'ai un mouvement de recul. Un bruit strident envahit mes tympans, comme le sifflement d'une balle qui m'aurait frôlé de trop près. J'aperçois, fiché en terre et presque sous mon nez, une longue et fine baguette surmontée d'un plumeau et de rubans teintés de sang, encore agitée du tremblement de la fine lance sous l'effet de son violent impact au sol.

Des voix, des gémissements, des invectives, des caquetages d'oiseaux, des sons de tambours, des bruits, des cris gutturaux comme sortis du gosier de monstres imaginaires, les piétinements rapprochés d'êtres invisibles, là, tout près; d'autres flèches qui s'abattent inopinément autour de moi, au moindre de mes mouvements. L'espace qui s'anime, qui prend vie soudainement, comme perturbé par l'invasion d'un corps étranger. J'en suis glacé d'effroi.



le masque
Les pierres s'agitent sous mon nez en un ballet désordonné, elles semblent me narguer; des ombres inquiétantes se profilent au loin; j'essaie de faire un mouvement, les flèches se fichent au sol comme pour m'interdire tout mouvement dans quelque sens que ce soit. Elles m'entourent sans jamais ne m'atteindre, comme si l'espace où je me trouvais était protégé par un ange gardien invisible et que le danger réel ne pouvait se manifester qu'au-delà cette frontière étroite. Il m'est impossible d'avancer, d'atteindre l'une des pierres ou de rebrousser chemin sans provoquer le réveil belliqueux des lieux, l'envol des flèches meurtrières. Je suis glacé d'effroi. Il me suffirait de me lever, les snipers feraient crépiter leurs armes, j'aurais de la compagnie, une milice peut-être pour me faire prisonnier, éliminer mes angoisses, au prix d'une incarcération, d'une pénible corvée. Ou serais-je sacrifié aux monstres invisibles qui se terrent tout près de là?

Puis le sol se met à bouger sous moi, en des mouvements ondulatoires lents et rythmiques; il se soulève et m'entraîne dans un lent mouvement ascensionnel. Je n'ai pas bougé de ma position, mon corps est largement étalé au sol, les membres écartés comme pour m'empêcher de basculer, je sens le sol se désagréger sous mes rudes vêtements militaires, puis se transformer graduellement en une forme presque humaine, un spectre sorti des entrailles de la terre. Je suis figé d'effroi, immobile comme pour éviter de signaler ma présence pendant que se dessine petit à petit la forme du spectre, le corps d'une femme immobile et endormie,une jeune sauvagesse sortie inopinément des entrailles de la terre et qui me supporte de son corps nu, glacial et gracile.

Me lever, prendre la fuite, j'en suis incapable comme figé par une inexplicable force, qui me retient allongé au-dessus du corps inerte de l'étrange créature sortie des entrailles de la terre; je me soulève légèrement, mes forces m'empêchent d'aller plus loin, elle est là inerte, glaciale et nue.


la naissance de l'indienne

(attention: image animée volumineuse)



Marco Polo ou le voyage imaginaire (Contes et légendes érotiques, août 1998) © 1998 Jean-Pierre Lapointe


ACTE III