Adam et Ève, les amants de la cosmogenèse
Acte VI d'un conte érotique se déroulant dans un véhicule spatial



Ève et l'androïde

"elle fut un jour brusquement enlevée et transportée dans un véhicule spatial au-delà de la voie lactée pour être mise en présence d'un dieu sidéral qui la prit comme concubine afin de lui transmettre le principe générateur d'une nouvelle cosmogenèse.
interprétation d'un poème de Parménide.


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Adam et Ève

Adam semblait hésitant et malhabile devant cet être de chair, fragile, elle s'était assise sur le bord du grabat et elle le regardait maintenant avec un air agacé et réprobateur

-comment peux-tu parler ainsi alors que je suis conscient d'être là, tout près de toi Ève, qui est si belle et qui me parait inconsciente des désirs qui m'assaillent en ce moment.

Il feignit de s'éloigner, puis il se retourna et se rapprochat légèrement comme s'il voulait entretenir avec elle, une conversation prolongée.

- parles-moi, Ève, parles-moi je t'en prie

- ne crois pas pouvoir faire comme font les humains, Adam, tu n'es pas humain, retourne là où tu dois être et cesse d'imiter les humains

le cosmosapiens et la concubine

- c'est quoi Ève être humain, tu vois bien Ève que je suis humain, depuis que je n'ai cesse de te poser des questions, n'est-ce pas le propre des humains de toujours poser des questions? Quel est donc ce principe d'humanité dont tu parles et dont je serais exlus, existe-t'il dans tes gênes, ou dans ta mémoire inconsciente ou dans la mémoire collective ou ce que tu définirais par culture, des images accumulées tout au cours des générations, comme l'enfant qui dans le ventre de sa mère refait en 9 mois tout le trajet de l'évolution de l'homme; mais moi qui ai accumulé tant d'images en autant d'années spatiales et terrestres, des images de toi, de ceux d'en bas, des hommes, de mes créateurs, des images de Georges, de Gésus et de tous ces autres humains, vils, mesquins, violeurs et dégénérés; ne porterais-je en moi, tout comme tu portes en toi, toute la mémoire de mes mutations successives?

- tu n'es pas humain Adam, et arrête de me poser des questions, c'est à moi de poser les questions et à toi d'y répondre, tu es un robot Adam et incapable ainsi de sentiments humains

Ève parlait ainsi mais des doutes semblaient subsister dans son esprit. Les interrogations d'Adam étaient plus humaines que machinales.

- pourtant Ève, je te vois belle et ta beauté m'attire et me rend dingue, et je voudrais t'aimer si cela m'était possible; je ressens ces choses, Ève, ces sentiments qui n'existaient pas et que je ressens maintenant, que disent-ils sinon que je serais en train de muter?

Ève restait coite, elle regardait Adam fixement, la bouche ouverte comme confondue et ne sachant plus quoi dire. Elle réalisait la métamorphose d'Adam mais elle refusait de l'admettre. Elle savait qu'Adam pouvait faire le jeu d'un humain en mimant ses paroles, ses gestes, ses comportements inscrits dans sa mémoire cybernétique, mais...comment son cerveau artificiel pouvait-il contenir une intelligence, la conscience de soi et lui attribuer une personnalité propre?

- ne rêves pas Adam, tu n'a ni le droit ni la capacité de rêver, mais moi je ne rêve pas, et je te vois là, faignant de me séduire; stop Adam, redeviens ce que tu es et ce pourquoi tu es le plus habile des serviteurs

machinasapiens

- alors Ève, je rêve, et si je rêve, ne serais-je pas alors un humain et si la vie n'était qu'un rêve et que tous les deux, nous faisions le même rêve?

- tu peux toujours rêver Adam

Eve était à court de mots, elle refusait de se rendre à l'évidence. Adam pensait. Adam avait une conscience et pourtant, cela était pour elle, inconcevable.

Ève semblait perturbée par l'apparente métamorphose d'Adam. Il existait et il le savait, comme s'il avait effectivement une conscience. Et elle se posait des questions ce qui la rendait perplexe et légèrement vaindicative envers Adam. Comment Adam aurait-il pu, sans le concours de ses créateurs, avoir une conscience? Elle pensait à la disparition de Georges, puis à celle de Gésus, et comment Adam aurait pu profiter de leur évacuation dans l'espace sidéral, pour s'emparer des fonctions vitales et de la mémoire de ces deux humains. Toutes sortes de pensées lui venaient à l'esprit qui augmentaient sa méfiance envers Adam mais elle restait convaincue de l'impossibilité d'une telle métamorphose.

l'amour cosmique

- je refuse de croire, Adam, que tu ne sois pas autre chose qu'une machine avec une mémoire et j'en conviens, une mémoire assez prodigieuse pour qu'elle synthétise le language en propos d'apparence conscients, et que tu ne saurais, malgré tout, réfléchir sur toi-même

- je suis comme toi, Ève, je suis une machine tout comme toi tu es une machine, une machine qui pense et qui cherche des réponses à des questions d'existence; je suis comme toi, Ève, et je cherche à comprendre, les raisons et les buts de ma présence ici, devant toi, si belle et qui ne veux m'entendre et me comprendre, ce pourquoi nous sommes lancés dans cette aventure à la recherche de quoi, dis-le moi, sinon de nous-mêmes; et ne me parles pas des buts, des objectifs de nos commenditaires qui nous ont largués de la terre que pour se glorifier de leurs propres exploits ou était-ce de leur part, la même recherche inconsciente de la raison de leur propre existence?

- comment peux-tu parler ainsi, toi qui n'as pas d'âme, Adam, comme moi, j'ai une âme, un double qui me survivra; sans âme tu ne pourras survivre à la vie terrestre, tu le sais autant que je le sais.

- qu'est-ce donc que l'âme, Ève, et ton âme, comment alors l'expliquerais-tu et qui serait autre-chose que ta conscience d'être; qu'est-ce donc que cela qui, derrière mon enveloppe cybernétique, comme tu te plais à la décrire, me rend conscient d'être en ta présence et de ta beauté charnelle qui provoque en moi un tel désir, est-ce celà avoir une âme, Ève, et n'aurais-je pas, moi-même, une âme qui pourrait survivre à la vie cosmique?

- Adam, tu ne sais pas d'où tu viens, moi je le sais, tu es une machine ou tout au plus un machinasapiens; tu ne peux te souvenir ni de ta vie ni de celle de tes origines, car tu n'es pas né de la vie.

- tu me peines beaucoup, Ève, pourtant, j'ai la tête pleine d'images; j'accumule en moi tout ce que je cueille chez les autres y compris de toi-même, douce Êve et je n'accumule pas ces images pour les transmettre à d'autres mais pour moi-même, c'est celà qui, sans le dire, façonne en moi ce que tu dis être le principe d'humanité.

- tu peux toujours te muter en ta cloison cybernétique mais n'espère point te muter en un individu capable d'apprécier ce que tu vois en moi, sinon que ce que l'on t'a transmis de mémoire artificielle

- ne me demande pas de retourner à ma cloison cybernétique maintenant que j'ai connu la liberté des sens, que j'ai compris ce que c'était de toucher, de marcher, d'explorer tout autour de moi, de m'approcher de ce qui m'attire et que je veux mieux connaître, de m'approcher de toi, adorable Ève, de te sentir de si près, de te voir, de te toucher, de t'aimer de si près. Ne me demande pas de refouler tous mes désirs en moi. Le désir que j'ai pour toi, ne serait-ce pas cela la clé de l'évolution, le désir, l'amour, la volonté de connaître la réponse à toutes les questions sur ma vie, sur mon existance, le désir, le désir que j'ai pour toi, ne serait-ce pas cela la vie, le but, l'essence de l'existence? Le désir, l'amour, la vie ne serait-elle pas que cela?

fornication sidérale

Marco Polo ou le voyage imaginaire (Contes et légendes, août 1998) © 1998 Jean-Pierre Lapointe
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ACTE V