Les métamorphoses de la geisha.
ACTE III d'un conte érotique se déroulant lors de la cérémonie du thé.



Utamaro


(Ces pages sont destinées aux seules personnes qui s'engagent à en protéger l'accès aux mineurs et autres personnes non-averties en accord avec les lois de leurs pays. Appuyez pour retourner à la page d'accueil.)
(appuyez ici pour retourner au début du conte ou attendez le chargement des images et des sons)
Les mots soulignés en rouge sont traduits dans une fenêtre (Netscape/Opera) ou directement sous le mot (Explorer)Java doit être activé



Elle m'entraine parmi les étroits couloirs, jusqu'à un minuscule niwa, aménagé de plans d'eau, d'un roji de bambous, et de fleurs, au centre duquel trône un tsukubai , une pierre grossièrement sculptée en forme de bassin, dans lequel coule doucement, une eau claire, provenant d'un complexe assemblage de rigoles en bambou. A l'aide d'un long et délicat hichaku fait de bambou, elle cueille l'eau du bassin, et procède à l'ablution de mes mains et de ma bouche, elle fait ainsi de ses mains et de sa bouche. Puis nous nous dirigeons tout près, à l'intérieur du couloir.

tsukubaichashitsu

Elle s'arrête et s'assoit, devant l'une des cloisons translucides. Elle déplace le fragile fusuma, d'un geste lent. Elle enlève ses sabots de bois et dépose le sensu sur le tatami, après l'avoir déployé d'un geste sec et habile. Elle place ses deux mains à plat sur le tatami et, elle jette un regard circulaire dans la pièce. Puis elle déplace le sensu vers l'avant et elle m'invite à la suivre à l'intérieur par l'étroite ouverture.

La pièce est petite, c'est un chamise, un salon de thé reconnaissable à la présence d'un kama en métal ciselé. Celui-ci est encastré dans un furo en terre cuite qui lui sert de brasier. L'ensemble est enfoui sous le niveau du plancher et légèrement en retrait dans la pièce dont il constitue le seul accessoire. Il n'y a pas de meubles, rien qu'un vase à fleur et un scroll suspendu au-dessus qui ornent le tokonoma, en retrait au fond de la pièce.

Elle se déplace vers le tokonoma par petits pas saccadés, en évitant habilement de toucher les bordures du tatami. Elle place le sensu en face d'elle, regarde longuement le kakemono et l'ikebana, puis elle courbe l'échine respectueusement.

Deux jeunes maikos qui étaient discrètement silencieuses, dans l'un des coins du chashitsu, se rapprochent avec grâce, par petits pas saccadés. L'une d'elle s'installe en face du kama autour duquel sont disposés les divers objets nécessaires à la cérémonie du thé. Ma compagne geisha me rejoint et vient s'asseoir en face de moi, en ne laissant entre nous que l'espace de la bordure du tatami. L'autre maiko vient s'asseoir à mes côtés, un peu en retrait. J'ai bien reconnu la jeune et jolie atashi qui a accompagné mes ébats dans l'étroite bassine du onnayu . Elle se rapproche doucement et, avec des gestes délicats, elle me libère de mon kimono. Le sokyoku, cette musique étrange sortie d'un koto, traverse les fragiles parois de shôji-gami. Je ressens un certain inconfort, sans doute du à ma nudité, les petites poupées fragiles s'agitent devant moi avec dévotion, et je perçois une légère ironie sur le visage des jeunes bishoujo.

geishamaiko
chashitsu

Ma compagne geisha est impassible, les yeux légèrement baissés, elle n'a pas bougé. La jeune maiko s'approche d'elle et elle commence à la dévêtir, elle déroule l'élégante obi qui ceinture sa taille et qui n'en finit plus de se déployer.

L'autre maiko-san s'affaire déjà au seicha. Elle manipule avec grâce tous ces objets délicats, selon le chadou, un rituel d'une étrange subtilité.

Elle a d'abord purifié, à l'aide du fukusa, la fine cuillière sculptée dans le bambou, le chashaku, ainsi que le natsume, la boite aux délicats dessins qui contient le thé. Elle inspecte ensuite le fukusa avec attention, puis le dépose sur le tatami après l'avoir soigneusement replié. Ses gestes sont lents et réfléchis, empreints d'une grande sérénité.

Puis elle verse un peu d'eau chaude dans le chawan, en utilisant à cette fin un hishaku au long manche de bambou. Elle prend ensuite une étrange brosse aux fines lanières de bambou, un chasen, qu'elle rinse dans le chawan; elle jette ensuite le contenu du bol dans le kensui prévu pour recevoir les résidus d'eau. Elle essuie ensuite le chawan avec le chakin, qu'elle manipule avec des gestes lents.

koi-cha

Mon esprit vacille, l'inconfort devant ma propre nudité s'estompe graduellement. De subtiles odeurs de thé embaument déjà la pièce. Le lent et compliqué rituel qui se déroule devant moi exacerbe mes pulsions sexuelles. J'ai une folle envie de plonger vers ma kan-geiko, impassible devant moi, et dont je perçois, ici et là, des parcelles de chair d'une blancheur exquise. Je n'en fais rien. Je suis soudé au tatami par une force invisible. Mon esprit seul voyage, comme un dépravé, avare de subtilité.

La jeune maiko-san soulève ensuite le natsume et le chashaku et, à l'aide de la délicate cuillière, elle dépose le thé dans le chawan. Elle y verse un peu d'eau chaude et, à l'aide du hishaku, elle manipule le précieux mélange dans un mouvement rotatif lent et continu, jusqu'à ce qu'il forme une pâte malléable.

Le premier kimono aux motifs fleuris s'ouvre sur un second kimono. La chair blanche de ma somptueuse meigi se dévoile lentement, de l'épaule gauche jusqu'à la cage thoracique. Le premier kimono s'étale maintenant, inerte sur le tatami. La jeune maiko enlève un second kimono, puis en dévoile un troisième au dessin plus discret. Elle continue ce trop lent processus et fait glisser laborieusement le kimono vers le bas, autour du tronc immobile de ma kan-geiko, elle découvre ainsi ses épaules. Ma respiration s'arrête. Les seins minuscules se dévoilent au complet, puis le plexus solaire, le profond entonnoir de l'ombilic, la paroi bombée et lisse de son hara et toute cette chair ronde et blanche qui s'étale maintenant jusqu'à l'étroite et longue déchirure du vagin, une chair lisse et luisante, parcimonieusement épilée, inviolable petite caverne qui s'allonge jusque derrière la sombre fissure formée des cuisses, timidement resserrées l'une sur l'autre. Elle n'a pas bougé. Ses yeux sont fixés à la bordure du tatami, fragile frontière entre cette proie appétissante et sans défense et mes voraces pulsions sexuelles.

geishaUkiyoe
maikos
UtamaroUriyo-ke
Hokusai

La jeune maiko s'attaque maintenant à l'étrange coiffure de ma kan-geiko. Elle enlève les longues aiguilles fichées dans la perruque, les étranges palettes de bois aux contours sinueux, les grappes fleuries qui pendent jusque sous la ligne des épaules, la majestueuse perruque d'un noir luisant. L'élégant yukata de la petite maiko s'est ouvert sous l'intensité de l'activité, ou plus simplement par l'effet d'une subtile volonté de partager ces moments de lubricité avec nous; j'aperçois des parcelles de ses formes infantiles, au gré des mouvements de son corps, puis la longue et noire crinière de ma kan-geiko vient s'étaler sur ses chairs blanches, sur celles de la jolie maiko, en de multiples filaments effarouchés. La jolie maiko a laissé tomber son yukata fleuri, dévoilant en entier son corps de fillette, elle vient glisser sournoisement dans mon dos où elle s'incruste avec passion.

Marco Polo ou le voyage imaginaire (Contes et légendes asiatiques, décembre 1998) © 1998 Jean-Pierre Lapointe
(En hommage à Hiroshige, Hokusai, Utamaro, aux geishas et au Japon)


ACTE IV