le rêve du soldat
Diverses escales poétiques:
Le rêve du soldat .......
tuez mes frères
pleurez
mémoires de soldats.................
debout soldats
1990...........
le petit soldat
ennemi des hommes
Le rêve du soldat
J'irai au creux des sources
j'irai boire la mer, presque certain d'y rester
j'irai au creux des rêves
j'irai par la porte ouverte des bouches de suicide
vous n'aurez connu de moi
que la nuit sur le jour des autres
Vous n'aurez aimé en moi
que mon amour de la solitude.
J'irai la main tendue
la main couverte de regrets
de visages lacérés de lance-flammes
la main ouverte sur les hommes
la main ouverte sur le sang, sur l'amour,
sur l'amour du sang.
J'irai le ventre ouvert
le ventre ouvert sur mon appétit
sur ma soif d'amour, d'entendements
le ventre ouvert sur le jour
le ventre ouvert au soleil
au soleil qui ne brille plus
que sur les crânes fatigués
des marchands de guerres.
J'irai pourrir au cercueil
le doigt arraché aux plaintes des deuils
J'irai pourrir dans l'éternité
le crâne arraché aux marteaux des soldats
J'irai pourrir sous le sol
la langue tirée des connes philosophies
J'irai pourrir dans mes chairs
la chair recroquevillée contre le mal
J'irai contre l'homme
contre l'homme qui se bat contre l'homme
contre l'homme
contre-attaquer la raison qu'a l'homme d'attaquer
J'irai contre l'homme
contre le sang couvert d'hommes
contre l'homme couvert de sang
J'irai au bout de la fossille
J'irai couper mes doigts à la fossille
dire à la naissance
qu'elle a eu grand tord.
..
tuez mes frères
je martèle le sable de ciseaux d'ombre
ils sortiront bientôt les nouveaux-nés de la haine
je martèle le sable du talon, gauche, droite, gauche
allez vers la poitrine, droit sur le coeur
tuez l'amour en pleine poitrine
allez maudits chrétiens vous battre pour des riens
je m'essouffle dans ce désert
de sang, de haine, de guerre et de mysticisme
gauche sur le crâne
droite sur le sein
gauche, droite, sur tous les sables du monde
battant campagne de sang dans les sables d'enfants
battant le sang au fer des fusils
allez hommes, pourceaux, blindés
matraques humaines contre le mur invisible de l'amour
allez sur l'enfant et la femme dégueuler vos raisons
en rendez-vous organisés
tant qu'il y aura des hommes
pourquoi gaspiller son temps à laisser vivre un homme
sur un désert de sable blanc inutile
dans le soleil de feu sans renouvellements
les hommes nus dans la douceur du jour
pourquoi?
tuez mes frères.......
pleurez
pleurez sur la main fatiguée
pleurez sur le jour et la nuit
sur la main reposée des matins
pleurez sur la main du bon Dieu
pleurez sur la mort et la vie
les soldats morts inutilement
la veuve épargnée au cimetière isolé
l'enfant orphelin
pleurez sur vos nuits perchées
pleurez sur vos têtes
sur la tête des grands noms
pleurez sur la souffrance et la vie
au cauchemar naissance au matin
pleurez n'arrêtez pas de pleurer
de pleurer sur vous-mêmes
de pleurer sur eux-mêmes
de pleurer inutilement
de pleurer inlassablement
pleurez
mémoires de soldats
Soldats
- tenez contre mon crâne vos fusils assassins
soldats du jour qui pointez tristes sur l'horizon
soldats quotidiens, je vous donne mon corps
je le veux inerte
- au pied de son inventeur
Soldats
- ayez l'oeil juste et précis
ne ratez pas ce crâne car il n'a plus de fonction
ayez la mémoire courte
l'inventeur seul doit se souvenir
- et avoir du regret
Soldats
- qui hantez mes nuits
ne vous souvenez plus de nos rêves ensembles
car ils furent sans issue
il faut donc les mettre à la potence
- devant le ciel témoin
Soldats
- mes appétits filles
que je jette au dernier espoir d'être compris
une seule fois m'écoutez
et je serai quitte devant vous
- non devant Dieu.
debout soldats
debout soldats volcaniques humain
à l'assault des murailles de sang
la main sur la graine espoir demain
qu'il n'y ait plus d'espoir
au coeur
limiter l'existence
1990
les maîtres du monde ciblent mon âme
tirez la balle qu'il faut
allez au rendez-vous du sang
le canon vous tire un sourire
vous tire la balle qu'il faut
RETOUR AU CHOIX DES ESCALES POÉTIQUES
je retrouve des morceaux d'hommes
à propriétaires inconnus
des filles pleurent sur leurs seins taris
et les maîtres du monde se voilent le sexe
on dévaste nos coeurs
avec des plombs et des veuves
on déchausse nos âmes
dans les exécutions capitales des masses
il faut du rouge partout
dans les plaies des soldats innocents
sur les fesses meurtries des prostituées
dans la main du criminel
au pendant des crucifix
et le sang doit couler pour que ce soit vrai
ils n'ont qu'un couteau à s'enfoncer dans le crâne
mais ils en ont peur
ils n'ont qu'une gâchette à tirer
eux ne vont pas à la guerre
le sang des autres est plus rouge aux lâches
où sont donc les Napoléons tous les Louis royaux
et ceux d'aujourd'hui
à mille lieues des explosions atomiques
sur la planète Mars pendant qu'on expérimente la boule
derrière les Cadillacs blindées
car ils ont crainte que les vivas et les fleurs
se changent en balles
en bombes atomiques
en radio-activité
en 1790
RETOUR AU CHOIX DES ESCALES POÉTIQUES
le petit soldat
les villes iront mourir à l'est
les socles de crocodiles au poing
aboutira l'éternelle anarchie
les explosions feront sauter le soleil
les racines de saxophones dans leurs yeux
les petits soldats d'hier contre la république
une pluie d'acier engloutira les démocraties
le petit soldat reviendra au bout de son fossille
on nous attendra
la planète toute couverte
du déchet des anciens maîtres
nous marcherons sur les armes d'hier
un petit soldat le coeur sur son bras
il marchera sur les grenades
il détruira l'usine au trou de poussière
le coeur sur son poing
la cathédrale engloutie gémira à ses pieds
petit soldat sans nom, inconnu
qui deviendra individu et anarchiste
faites route au petit soldat
il est dangereux
laissez place au petit soldat
autrefois il tirait des balles
maintenant il tue
maintenant il sait pourquoi
il s'est retourné
il tire sur son soleil
il tire sur sa ville
il tire sur ses amis
il tire sur le monde
il tire sur son crâne
il a compris le petit soldat
maintenant il est un grand soldat.
ennemi des hommes
ennemi des hommes
Marco Polo ou le voyage imaginaire (poésie: soldats, 1959) © 1996 Jean-Pierre Lapointe
l'acier a quand même l'espace pour aller
ennemi des regards qui ne disent plus rien
le plomb fracasse nos soleils
et le sang s'accroche aux nuages
va dire la nouvelle à tous les cieux
ennemi de mon doigt
ennemi
tu bouffes à pleine gueule
mes restes de saison
mes courroies de chansons
et dieu te réserve une éternité pour rien
les hommes parsèment le béton
ils poussent dans le béton
machines d'un jour
supplantées au soleil chaud des maccadams
machines fatiguées
on aura cru aux paysages de cire
les doigts métalliques des fonderies
s'attaquent à leurs yeux
à leur poitrine
à leur crâne
les doigts métalliques des démocraties
s'attaquent à leurs idées
et creusent des canaux d'homme de cire
dans les paysages fondants
leurs soleils sont couchés
dans la fatigue à finir
les hommes sont tombés
fatigues à finir
écoutez au-delà la portée d'horizon
les poussières de volcans
les hommes aux crânes défoncés
vos restes de guerres finies.